Dans la famille Blanc, je demande le père, Paul, alias Paulot pour les intimes, cafetier de son état, véritable boute-en-train, qui n'hésite pas à payer de sa personne pour égailler les journées et soirées du Balto, pour le plus grand plaisir de ses clients.
Dans la famille Blanc, je demande la fille, Mathilde, véritable garçon manqué, gamine trompe-la-mort, qui est prête à tout pour être aimée de Paulot qui n'a d'yeux que pour son autre fille, Annie.
Sauf que Paulot (et plus tard sa femme Odile) sera frappé par tuberculose; l'obligeant lui et sa famille à quitter le Balto après 17 ans de bons et loyaux services, et à déménager dans la maison d'en face. Ce qui revient à tout brûler, le passé comme le futur, et à les plonger dans un isolement et un silence sans noms.
Les fièvres déclarées dans le village de La Roche les obligeront à le fuir - en parias et comme des rats - en s'installant un peu plus loin, à Limay (en ces temps, les tubards étaient enterrés dans un cimetierre séparé, comme s'ils continuaient à faire peur, même une fois morts...).
S'ensuivra une lente et inexorable descente aux enfers, d'épicerie en faillite aux loyers impayés, en passant par marchands de frites ambulants et éleveurs de souris pour les laboratoires Pasteur.
Même la faim finira par s'inviter à leurs repas qui n'en portent que le nom, limités le plus souvent à des patates et à des oeufs.
La maladie déclarée chez la mère Odile impliquera la prise en charge des enfants par l'assistance sociale, et leur envoi en familles d'accueil. C'est le début de la fin.
Sans argent, Mathilde devra faire preuve d'un courage et d'une énergie à toute épreuve afin de s'en sortir, après avoir fait une tentative de suicide à dix-huit ans à peine, suite à son incapacité à entrevoir un avenir serein.
Dans ce roman qui n'en est pas un (car basé sur une famille ayant réellement existé), et malgré un thème gris sombre comme un soir d'automne, j'ai apprécié la façon avec laquelle Valentine Goby a su rendre cette époque des Trente Glorieuses, les débuts de la sécurité sociale, et l'inhumanité des assistantes sociales.
Dans un style concis, sans fioritures, et réaliste, ce livre m'a fait réaliser que, malgré les menus tracas de la vie quotidienne, nous en avions bien de la chance de vivre à notre époque. La morale que j'en tire étant : à force de courage et de volonté, on peut redonner de l'humanité à notre vie, et ce malgré les aleas qu'elle nous réserve.
Un grand merci à @ActesSud et à @priceminister pour cette lecture #MRL16
(Chroniqué dans le cadre de l'opération des Matchs de la Rentrée Littéraire 2.016 organisée par Priceminister)