dimanche 4 décembre 2011

Le baiser de la mouche, de Chris Simon


C'est par un heureux hasard que j'ai croisé la route de la nouvelliste franco-américaine Chris Simon qui m'a gentiment proposé de lire son recueil de nouvelles à tendance fantastique.

Si la "nouvelle" n'a pas encore acquis ses lettres de noblesse dans nos européennes contrées (au contraire par exemple de l'Amérique du sud), je dois avouer que Chris Simon tente avec succès d'y contribuer, en partant par sept fois d'un cadre banal au décor planté dès les premières lignes pour y injecter au détour d'une phrase en apparence anodine un élément perturbateur qui vient ébranler nos certitudes de lecteur à qui on ne le fait pas.
On y croise un garçon amoureux d'une fille au point de vouloir garder un morceau d'elle (sa langue), l'apparition d'une bouche au creux d'une main (réalité? rêve? illusion?), un gnome prénommé Apple habitant à New York, un fruit africain dont le noyau renferme une âme.

Le recueil nous permet au cours du même voyage de croiser l'art sous toutes ses formes, comme la littérature, la musique, et la peinture (l'Ecole de Barbizon).

Mention spéciale à la nouvelle qui donne son titre au recueil, qui relate une relation poétique entretenue avec une mouche. L'auteur parvient ainsi à vaincre la vexation exprimée par Julio Cortazar quand il analysait avec recul son conte "Axolotl" : "Ce qui est pour moi exaspérant, c'est cette notion d'incommunicabilité totale qu'il peut y avoir entre une mouche et un homme".

Je vous invite à découvrir l'univers de l'auteure en allant visiter son Blog : http://lebaiserdelamouche.wordpress.com/

Je remercie Chris de m'avoir permis d'explorer ce genre littéraire trop peu connu.

A bientôt pour de nouvelles découvertes...

dimanche 13 novembre 2011

1Q84 tome 1, de Haruki Murakami

Il est enfin arrivé ! Ce fameux 1Q84 que la rentrée littéraire 2011 nous présentait comme un 'must-read' comme disent les anglophones !

J'ai eu la chance de lire le tome 1 de cette trilogie grâce à la généreuse opération "Les matchs de la Rentrée Littéraire 2011" organisée par PriceMinister et Rémi, que je remercie bien évidemment au passage :-)

En deux mots, il s'agit d'un récit à deux voix à la construction simple qui se compose de 24 chapitres, chaque chapitre racontant de manière alternée un moment dans la vie des deux héros principaux : Aomamé, la femme, et Tengo, l'homme.
  
On retrouve dans ce récit comme à chaque fois la 'patte' qui caractérise si clairement Haruki : une histoire apparemment banale au départ prenant peu à peu des touches fantastiques impliquant deux mondes parallèles interconnectant la réalité et le rêve, un style simple (mais pas simpliste) qui assure une grande facilité de lecture, des phrases courtes et des dialogues vivants, et bien évidemment une imagination foisonnante. Les fans devraient donc apprécier ce nouvel opus.

Cependant, la lecture du tome 1 m'a gêné pour trois raisons essentiellement : 
  • Au début, les chapitres Aomamé sont assez intrigants et prenants, car c'est par elle et ses interrogations sur un monde qu'elle trouve changé que démarre le roman; mais peu à peu, les chapitres Aomamé perdent en intérêt et on commence à tourner en rond avec ce personnage. Par contraste, les chapitres Tengo gagnent peu à peu en richesse, car ce personnage d'écrivain en quête de publication est très intéressant et les chapitres Tengo permettent à l'auteur de lancer une réflexion sur le travail de l'écrivain, sur les manigances des éditeurs pour obtenir tel ou tel prix et c'est vraiment passionnant! Enfin, Tengo se retrouve malgré lui entraîné dans une histoire qui le dépasse en même temps qu'elle le fascine... Bref, le personnage de Tengo devient assez vite très supérieur à celui d'Aomamé. 
  • Ensuite - et c'est un problème persistant de la littérature contemporaine (qu'elle soit française, américaine ou japonaise...) - ce sont les passages obligés de scènes érotiques, et il y en a pas mal dans la partie Aomamé. Bien qu'ils ne soient pas (trop) dérangeants, ils n'apportent rien au personnage ni au récit; ils sont donc à mon humble avis largement inutiles. 
  • Enfin, il y a quelques petits détails qui m'ont un peu dérangé; notamment à la fin du roman lorsque apparaissent de curieux petits personnages... Je pense qu'on en saura plus dans les deux tomes suivants; mais en attendant, on a l'impression que Haruki a étiré l'histoire dans le tome 1, sachant qu'il en écrirait deux autres; ce qui nous vaut quelques longueurs superflues, et cela au détriment de la densité du récit.

En conclusion : Récit intéressant à forte connotation imaginative (dans quel bain Haruki est-il tombé étant petit ?) qui 'se mange sans avoir faim', mais qui aurait cependant gagné à être condensé (et donc densifié) en 600 pages (au lieu du triple).

note : le troisième tome de la trilogie paraissant en mars prochain, les mordus se demandent en ce moment comment ils vont tenir le coup jusqu'au dénouement final (le lire en anglais ? voire en japonais ?). 


A bientôt pour de nouvelles découvertes



dimanche 18 septembre 2011

Les Matchs de la Rentrée Littéraire (en partenariat avec PriceMinister)

Une fois n'est pas coutume, j'ai aujourd'hui un bon plan littéraire à vous communiquer.

Grâce à Jostein, j'ai découvert ce partenariat avec Price Minister qui vous permettra de découvrir douze des  romans les plus attendus de cette Rentrée Littéraire 2011, jugez en par vous-même :
  1. Nestor rend les armes, de Clara Dupond-Monod
  2. La belle amour humaine, de Lyonel Trouillot
  3. 1Q84, de Haruki Murakami
  4. Les vaches de Staline, de Sofi Oksanen
  5. Le Pacte des Vierges, de Vanessa Schneider 
  6. Désolations, de David Vann
  7. Tuer le père, d’Amélie Nothomb
  8. Des vies d’oiseaux, de Véronique Ovaldé
  9. Les souvenirs, de David Foenkinos
  10. Limonov, de Emmanuel Carrère
  11. Rien ne s’oppose à la nuit, de Delphine de Vigan
  12. Freedom, de Jonathan Franzen
Comme vous voyez, que du beau linge (euh monde!) : en plus, il y en a pour tous les goûts et tous les styles.

Pour plus d'information sur les détails de cette opération PriceMinister, cliquez avant le 1er octobre (date limite des inscriptions) sur l'image ci-dessous. Bonne chance à vous !



dimanche 24 juillet 2011

La vie rêvée des plantes, de Seung-U Lee

Refermer ce livre m'a confirmé un désarroi qui grandissait en moi avec le temps qui passe : au plus je lis, et au plus je me rends compte que jamais je n'arriverai à lire tous ces livres qui attendent bien sagement dans leur coin pour me faire rêver...

Connaissant mes goûts pour les découvertes littéraires, je me suis cette fois envolé pour la Corée du Sud, avec le premier roman traduit en français (chez Zulma - dont on connait l'art de dénicher les perles) d'un auteur majeur dans la littérature coréenne contemporaine... comme souvent injustement inconnu sous nos lattitudes... ce voyage ne pouvait donc que me plaire sur papier; et il a comblé mes espérances.

A la fois mystérieux avec un zeste subtil de fantastique, mais également à haute teneur poétique de par son univers teinté de plantes et d'arbres, ainsi qu'une réflexion sur les relations et les non-dits entre les membres d'une famille, ce livre m'a fait penser à un savant mélange entre Yoko Ogawa et Murakami. Décidément, la littérature asiatique ne cessera jamais de me surpendre.

Un roman à apprécier également entre les lignes. Je ne peux donc que vous conseiller de vous laisser bercer comme moi par ce fort joli conte.

A bientôt pour mes prochaines découvertes !

dimanche 5 juin 2011

Les hommes sirènes, de Fabienne Juhel (attention pépite !)

Attention pépite !

Autant vous le dire tout de suite : ce livre vient de me confirmer ce que je pressentais déjà depuis un bon moment : il y a 'l'ittérature et 'L'ittérature; à savoir qu'il ne suffit pas - comme trop souvent de nos jours - de lire des mots alignés pour en qualifier automatiquement l'auteur d'écrivain.
Et c'est cette injustice que je tiens modestement à réparer dans ce billet, en vous révélant le nom d'une conteuse - d'une vraie - trop peu connue à mon goût : Fabienne Juhel.
En effet, Fabienne Juhel sait aligner les mots (souvent empreints de poésie) pour en broder des phrases qui nous content une Histoire avec un grand H. Ses mots sonnent justes; même qu'au détour d'une phrase, plus d'une fois elle nous en fait découvrir certains dont on ignorait jusqu'à la signification... Ses chapitres savent éveiller nos sens. Son récit nous fait voyager tant dans l'espace que dans le temps, faisant de nous un spectateur éprouvé par la lutte que se livrent le Bien et le Mal dans ce récit de chemin de croix que parcourt un homme à la recherche de ses racines et recherchant à vivre à nouveau en paix avec son passé.
En un mot comme en cent, l'auteur sait conter avec un réel talent qui fait tellement défaut de nos jours...

De moi vous n'aurez droit à aucun mot sur l'histoire du livre. Laissez-vous bercer par les phrases hautes en couleurs et en odeurs dont le récit est richement peuplé. Vous ne regrettez pas le voyage initiatique perlant de poésie à chaque page, et serez probablement tout comme moi déçu d'être arrivé à destination, en réalisant avoir tourné la dernière page...

Juste reprendre mon souffle pour vous dire que dans un élan d'enthousiasme, je viens de filer à la librairie acquérir les trois précédents ouvrages de Fabienne Juhel.

Ouf : injustice réparée avec mes maigres moyens. Mais je compte sur vous pour passer le mot à votre entourage... Il vous en remerciera par après, on parie ?

A bientôt pour de nouveaux coups de coeur...

dimanche 29 mai 2011

Les années douces, de Hiromi Kawakami

Décidément la littérature japonaise ne cessera jamais de m'étonner... dans le bon sens du terme !
Ce petit travail d'orfèvre - qui ne paie pas de mine de prime abord - nous décrit la rencontre un peu par hasard (encore une oeuvre du destin à coup sûr) entre une jeune femme appréciant sa vie de célibataire et son ancien professeur de japonais, ainsi que la relation qui va naître et se développer entre ces deux êtres solitaires qui vont redécouvrir les petits bonheurs partagés à deux.

Banale histoire déjà écrite moultes fois me direz-vous. Et vous aurez mille fois raison ! Je peux par ailleurs également  comprendre les lecteurs qui n'ont pas été sensibles à la relative 'fadeur' du récit où il ne se passe rien, ou si peu... Mais c'est justement cette apparente banalité de l'histoire que l'auteur se plait à mettre en relief par ces petits détails auxquels la plupart d'entre nous ne prêtons même plus attention; un peu à l'image d'une peintre peaufinant sa toile avec des petits coups de pinceaux discrets ça et là donnant son cachet final à son oeuvre.

Chez Hiromi Kawakami, les évocations véhiculent plus d'émotion que les mots prononcés et les décors participent autant à l'ambiance de la scène que les personnages.

Une très bonne découverte pour moi donc, par laquelle je vous conseille ardemment de vous laisser tenter, à lire tant en hiver enmitouflé sous un gros plaid ou à l'ombre d'un cerisier en fleurs durant la saison ... douce ;-).

A bientôt pour d'autres découvertes

lundi 25 avril 2011

Le théorème d'Almodovar, de Antoni Casas Ros

Premier roman d'un écrivain catalan français, et jolie surprise pour moi qui aime les romans (mais en est-ce bien un ?) avec une touche de poésie...

En deux mots, le narrateur y raconte son parcours (du combattant) suite à un accident de la route (occasionné par un cerf) au cours duquel il perd sa fiancée, mais aussi son visage... En vrai pigeon voyageur, il déménage régulièrement, vivant reclus en donnant des cours de mathématiques via internet, ne sortant que le soir (pour fuir le regard des gens dits normaux), et vivant surtout la nuit.
Il fera des rencontres décisives, comme un transsexuel prostitué au grand coeur, le cinéaste Almodovar , mais aussi le fameux cerf... Tous trois lui en apprendront un peu plus sur ses peurs et ses doutes.

Les thèmes abordés et les réflexions à méditer dans ce court roman sont légion, comme la guerre civile espagnole et le fachisme, la beauté du corps et des arts, le besoin pour tout personne d'être aimée, le regard des autres, la nécessité de vivre SA vie comme on l'entend, ...Tout cela baigné dans un éther de théorèmes mathématiques, de poésie et de surréalisme nous donne - comme vous l'aurez compris - un roman atypique, voire inclassable sortant du lot, comme on aimerait en lire plus. Chapeau donc à l'auteur pour un premier roman de cette verve.

Il va sans dire que son livre 'Enigma' (sortant en juin en poche) compte déjà un lecteur impatient de voir sa sortie en librairie..

A bientôt donc pour un nouveau coup de coeur...

dimanche 10 avril 2011

Confession d'un masque, de Yukio Mishima


Poursuivant ma découverte de l'oeuvre de Mishima, je me suis cette fois attaqué à un livre qu'il à écrit à 24 ans.
Roman que l'on devine aisément fortement autobiographique si l'on compare la vie du personnage principal à celle de Mishima. Une vie sans grand soutien parental, un physique frêle et une santé plus que fragile font sentir dès sa naissance au héros -bien malgré lui- que la vie n'est pas exactement un cadeau (ou un empoisonné alors)... la 'cerise sur la gâteau' étant la découverte de son a-normalité, à savoir son homosexualité combinée à des tendances perverses, voire sadomasochistes. 
Il s'agit donc ici de la confession d'un être se sentant obligé de paraître 'normal', et de vivre ce qu'il considère comme une maladie sous les traits d'un masque. D'où le titre du livre ...

Parler d'un livre aussi dense n'est pas aisé; mais un paragraphe résume assez bien la vision que le héros (et donc Mishima) a de sa vie, ainsi que comment il envisage son (tragique) dénouement : 

"Les raids aériens devenaient plus fréquents. J'en avais une peur extraordinaire et pourtant j'attendais en même temps la mort avec une sorte d'impatience, avec une espérance pleine de douceur. L'avenir était pour moi un lourd fardeau. Dès le début, la vie m'avait écrasé sous un pesant sentiment du devoir. Bien que je fusse de toute évidence incapable d'accomplir ce devoir, la vie me harcelait, me reprochait ce manquement. C'est pourquoi j'aspirais à l'immense soulagement que sans aucun doute m'apporterait la mort si seulement, comme un lutteur, je pouvais arracher de mes épaules le lourds poids de la vie. J'acceptais avec volupté la conception de la mort en honneur pendant la guerre."


On l'aura compris, la vie de Mishima n'avait aucune chance de se terminer en conte de fées... Jusqu'au bout il aura tenu à donner à sa vie (et donc à sa mort) un côté théatral.

Quand j'ai appris que Mishima écrivit ce récit à ving-quatre ans à peine, je fus sidéré par sa maturité à sonder son âme et à analyser avec une telle finesse ses sentiments équivoques.


En résumé, un livre qui n'est certes pas simple à aborder; mais qui mérite le détour pour qui veut en apprendre plus sur les démons et contradictions qui ont hanté la vie de ce grand écrivain qu'est Mishima. 


P.S. : à bientôt pour mes nouvelles découvertes japonisantes (vu que j'y ai pris goût...)


samedi 26 février 2011

Dojoji et autres nouvelles, de Yukio Mishima

Pour une fois, le quatrième de couverture ne trompe pas le lecteur sur la marchandise. Il s'agit bien de faire connaissance en quatre courtes nouvelles avec l'univers de Mishima (pour 2 malheureux euros ! aucune excuse pour ne pas profiter de cette occasion....!). C'est donc par ce court recueil que j'ai commencé. Il m'a plus tant les nouvelles sont différentes tant par la forme (une pièce de théâtre dans "Dodoji"), que le ton (léger dans "La Perle"), et le thème (les geïshas dans "Les Sept Ponts").

Mention spéciale pour "Patriotisme", où il vaut mieux avoir l'estomac (et le ventre) bien accrochés, tant la violence des mots et des images est forte. Le lecteur en devient presque fasciné par la fascination du lieutenant pour la beauté de sa propre mort. Deux thèmes chers à Mishima : beauté et mort; la boucle est bouclée...

Ce recueil m'a en tout cas donné envie de poursuivre ma découverte de cet auteur.

A bientôt pour de nouvelles découvertes ;o)